Quand on lit des comics, on peut ne pas être d’accord. On peut préferer DC à Marvel, Wolverine à Spider-Man, aimer ou détester Deadpool, adorer Steranko ou détester Frank Quitely, vomir sur Bendis et Millar ou les trouver géniaux. Il y a autant d’avis que de lecteurs, et une chose qui nous réunit : le plaisir.

Je me souviens ce qui a motivé mes premiers achats comics : le plaisir et l’attente. Quand j’étais jeune, je lisais Titans. Je l’ai longtemps acheté en kiosque. La production Semic a augmenté, alors je me suis abonné pour faire des économies et acheter plus. Quand on a 50 francs d’argent de poche par mois, il faut faire des choix. Chaque début mois, j’étais comme un fou, l’attente était insupportable. J’avais reperé que dans l’ours, le staff de Semic rajoutait la date du dépot légal. De mémoire c’était le 5 du mois pour Titans, et le 10 pour Spécial Strange (ou l’inverse). Je savais donc quand devaient sortir mes titres, faisant le pied de grue chez mon marchand de journaux, où devant ma boite aux lettres. Je maudissais chaque grêve de la poste qui repoussait de quelques jours l’arrivée de mon Titans. Je dévorais Titans. Je lisais tout, au point d’être furieux quand dans les crédits, ils oubliaient de mettre à quel numéro américain correspondait le numéro Français (écrit entre parenthèses dans Spécial Strange, rarement dans Titans). Je ralais quand la couverture était couverte d’accroches bidons, quand un épisode des Nouveaux Mutants passait à l’as, ou quand ils ont pendant 3 mois remplacé toutes les séries par un Crossover Cosmique nullissime avec le Surfeur d’Argent. Le Surfeur d’Argent n’avait rien à faire dans Titans. Je me souviens avoir adoré Epsilon et Chronos, les Nouveaux Mutants d’Arthur Adams, Force Works, et même Blackwulf. Je me souviens avoir detesté Brett Blevins et Terry Shoemaker puis adoré Rob Liefeld, avant de changer d’avis en grandissant. Titans était une drogue.

On parle beaucoup des chiffres de vente de comics depuis 10 ans (depuis qu’ils sont disponibles en fait). On les commente comme on commente des chiffres les audiences de TF1, le score des films de Dany Boon. Notre societé a besoin de chiffres, de repères, d’une base pour comparer. Les lecteurs donnent leur avis sur la marché, sur les hauts et les bas des comics en single, sur les ventes de TPB, de HC et sur les évolutions de comportements.

J’achete mes comics surtout en VO, par confort de lecture et par coqueterie. J’ai longtemps acheté mes singles chez Gael. Puis Marvel a sorti beaucoup de belles éditions, des TPB et des HC. Amazon et les autres ont proposé des prix interessants, et je suis passé au tout TPB. J’ai économisé de l’argent, j’ai découvert plein de choses, rempli mon appartement de centaines de reliés, acheté des trucs inutiles, mais j’y ai perdu. J’ai perdu le plaisir de lire, d’attendre, et de dévorer ce format de 22 pages. Car les comics, on les aime ainsi, pour leur coté « série », pour leur coté « à suivre », le coté « feuilleton » avec ses cliffhangers et sa récurrence. Le TPB tue ce plaisir de lecture, et tue la frustration et le plaisir de l’attente. Alors certes, il y a de belles éditions, de magnifiques HC, de superbes Omnibus (je les collectionne plus que je ne les lis) mais rien ne remplace les mensuels.

Depuis un an, j’ai recommencé à acheter des singles en VO. Ils sont chers, mais quel plaisir ! Quel plaisir d’aller chaque mercredi en boutique, quel plaisir de prendre quelques comics en rayon en plus de ses réservations, quel plaisir de lire mois après mois Batman Inc. ou Ultimate Spider-Man. Il n’y a rien de meilleur pour un fan, pour un collectionneur. Les comics existent parce qu’ils sortent chaque semaine, c’est leur nature, et c’est la raison pour laquelle nous les achetons, peu importe le prix ou la qualité (on a tous acheté de numéros moisis). Il ne faut pas changer celà, il faut en jouer, justement, et s’inspirer de ce qui a fait leur succès pour les relancer (la télévision n’a fait qu’appliquer ces méthodes de feuilletons à suivre avec des cliffhangers au final). Revenons aux bases du média, et il vivra encore très longtemps. Lisez des comics, offrez en, soutenez les comme vous les aimez, ils sont produits pour vous, pas pour les enfants qui vont aller voir Thor et Captain America au cinéma.